La volonté d’accélérer la procédure pénale n’est pas neuve.
La mise en œuvre d’une procédure accélérée est toutefois particulièrement complexe dès lors qu’elle doit respecter un juste équilibre entre rapidité, respect de droits de la défense et droit des victimes.
La dernière loi qui a été adoptée en la matière a été annulée par la Cour d’Arbitrage (devenue Cour constitutionnelle) en 2002.
Une procédure de comparution immédiate subsiste cependant.
L’article 216quater du Code d’instruction criminelle permet en effet au ministère public de convoquer immédiatement une personne arrêtée devant le tribunal correctionnel. L’intéressé demeure libre mais sait qu’une audience est prévue au plus tôt dans les 10 jours et au plus tard dans le mois devant le tribunal correctionnel.
Le cas échéant, lorsque le magistrat du ministère public craint une récidive pendant le délai ci-avant, notamment compte tenu d'une participation effrénée à une vague de mouvements violents, il peut saisir un juge d'instruction et celui-ci peut décerner à l'arrêt un mandat d'arrêt ou imposer les conditions à la libération du justiciable s'il estime être dans les conditions pour le faire.
Dans certains arrondissements judiciaires, des procédures accélérées ont été mises en place à l’initiative du président du tribunal avec l’accord du ministère public et la collaboration du barreau. Certains points sont perfectibles et doivent s’affiner à l’usage mais le système fonctionne globalement à la satisfaction de tous (prévenus – parties civiles). Ces procédures restent respectueuses des droits de la défense dans une temporalité adaptée.
Nul besoin donc de modifier le Code d’instruction criminelle. Des solutions existent déjà mais mériteraient d’être encouragées !
Pourtant, dans le cadre d’un compromis politique, le gouvernement a voulu mettre en place une procédure encore plus accélérée en évitant soigneusement tout débat approfondi.
L’idée initiale du gouvernement était de faire passer cette procédure via des amendements déposés en séance plénière. In extremis, les amendements ont toutefois été renvoyés en commission de la justice où ils ont été adoptés séance tenante sans que la moindre audition d’experts (magistrats et avocats) n’ait été organisée.
AVOCATS.BE estime que cette accélération de la procédure portera gravement atteinte aux droits des victimes et augmentera encore la surpopulation pénitentiaire.
La victime oubliée…
La situation de la victime, s’il s’agit de faits graves, n’est pas prise en considération dans le projet.
La brièveté des délais ne lui permettra pas d’effectuer les démarches proactives pour se constituer partie civile (prendre rendez-vous avec un avocat, faire une déclaration de personne lésée, réunir les pièces relatives à son dommage).
Elle ne participera pas au règlement de la procédure, qui est réalisé par le juge d’instruction sans aucune contradiction. Si la victime entend, par exemple, faire reconnaître une circonstance aggravante à des coups et blessures, ou corriger un mauvais libellé ou relever l’oubli d’une prévention, elle ne sera pas invitée à participer à ce règlement de la procédure.
Risque d’augmenter encore la surpopulation carcérale
La nouvelle procédure implique que la personne poursuivie soit en détention préventive.
On peut dès lors donc craindre un recours accru à la détention préventive que tous les intervenants décrivent déjà comme excessive dans notre pays.
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Si le projet est adopté en l’état, AVOCATS.BE entend examiner toutes les possibilités de demander une annulation de la nouvelle procédure par la Cour constitutionnelle. Il est dès lors fort à craindre que cette loi soit une régression des droits et particulièrement ceux des victimes.